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Rentrée littéraire 2024 : 7 romans coups de cœur

Premiers romans, récits d’auteurs à succès, aventures flamboyantes, réinventions de l’histoire ou chroniques de vies… Dans ce foisonnement qu’est la rentrée littéraire, nous avons choisi de mettre en lumière 7 romans coups de cœur, comme autant de respirations au beau milieu d’une période de l’année où tout s’accélère. 

La rentrée littéraire. Ce moment suspendu qui éveille notre curiosité. Qui nous submerge aussi un peu devant l’abondance des publications. 459 titres sont publiés cette année. Les 7 œuvres que nous avons choisies sont celles dont la substance, les mots et les styles nous ont touchés.

Des paysages désœuvrés de Belfast, où le premier roman de Michael Magee percute les espoirs d’un jeune paumé, jusqu’à l’Iran où l’émancipation de l’héroïne effrontée de Delphine Minoui nous transporte, la jeunesse, dans ses fêlures et sa force, donne des couleurs à cette rentrée littéraire. Roman initiatique, insolence et humour… La dérision et le style d’Emmanuelle Lambert nous ont conquis. De sa rencontre avec le pape du “Nouveau Roman” Alain Robbe-Grillet, l’autrice fait un récit à la fois drôle et intelligent.

« Pourquoi se suicide-t-on après avoir écrit un chef d’œuvre ? ». Stefan Zweig,  protagoniste d’un roman enquête lumineux

Autre écrivain disparu, Stefan Zweig dont le génie, l’histoire et la fin tragique font d’emblée un héros romanesque est le protagoniste autour duquel Sébastien Lapaque construit son enquête. « Pourquoi se suicide-t-on après avoir écrit un chef d’œuvre ? » , s’interroge-t-il. Fruit de vingt-cinq années de recherche à travers l’Europe, l’auteur confronte l’histoire et la politique dans un récit lumineux en s’appuyant sur la dernière conversation de l’écrivain autrichien avec le romancier français Georges Bernanos.

Nicolas Idier investit quant à lui le terrain politique sous son angle technique. À Matignon, le temps d’une nuit blanche, l’auteur se glisse dans la peau d’un conseiller. La tension grimpe jusqu’au délire dans ce roman jubilatoire au rythme effréné.

Huit ans après “Petit Pays”, Gaël Faye signe “Jacaranda”. La fin du silence.

Cette rentrée littéraire est aussi celle des retours. Gaël Faye, huit ans après “Petit Pays”, livre un texte dont la trame romanesque cherche à percer les silences. D’un Rwanda dévasté par le génocide des Tutsi, l’auteur dessine avec délicatesse les contours d’une paix retrouvée en rendant leur parole aux disparus.

Ode à la joie, “La vie meilleure » d’Étienne Kern rend hommage à un illustre personnage : Emile Coué. De sa méthode éponyme, désuète et souvent moquée, l’auteur se sert de prétexte pour dépeindre la personnalité d’un homme bon et rêveur. Un livre dont le style est empreint de douceur.

“Retour à Belfast” de Michael Magee

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“Il est coincé ici pour toujours, pas vrai ? Comme une souris prise au piège, il continuera à se tortiller dans les rues de Belfast jusqu’à son dernier souffle”. Après des études à Liverpool, Sean Maguire est de retour à Belfast parmi les siens. Il retrouve le quartier ouvrier où il a grandi, dans une ville meurtrie par plusieurs décennies de conflit entre catholiques et protestants, et où la prospérité promise par les accords de paix se fait toujours attendre. Sean n’a qu’une hâte : repartir dès que possible. Mais il est vite rattrapé par ses vieilles habitudes : les nuits blanches, l’alcool et la coke, l’argent emprunté, les loyers impayés et les boulots précaires. Jusqu’à ce qu’à ce moment fatidique où, lors d’une soirée, il commet un acte impardonnable. Pourra-t-il échapper à un destin tout tracé ? Ecrit au cordeau, ce premier roman aborde avec une remarquable lucidité des sujets très contemporains : masculinité toxique, déterminisme social et secrets de famille. A travers ce roman d’apprentissage extrêmement poignant, c’est le portrait de l’Irlande du Nord que brosse Michael Magee.

  • Albin Michel, 418 pages, 22,90 €
  • Traduction : Paul Matthieu

“La vie meilleure” d’Étienne Kern

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“Nous sommes la somme de nos amours. Et c’est la seule chose qui restera de nous.” On l’a comparé à Gandhi, à Einstein, à Lénine. Des foules l’ont acclamé. Des milliardaires lui ont tapé sur l’épaule. Les damnés de la terre l’ont imploré. Aujourd’hui, son nom nous fait sourire, tout comme son invention : la méthode Coué. Singulier destin que celui d’Émile Coué, obscur pharmacien français devenu célébrité mondiale, tour à tour adulé et moqué. La vie meilleure retrace l’histoire de ce précurseur du développement personnel qui, au début du XXe siècle, pensait avoir découvert les clés de la santé et du bonheur. Un homme sincère jusque dans sa roublardise, qui croyait plus que tout au pouvoir des mots et de l’imagination. Avec ce roman lumineux aux accents intimes, Etienne Kern rend hommage à ceux qui cherchent coûte que coûte une place pour la joie.

  • Gallimard, 192 pages, 19,50 €

“Échec et mat au paradis” de Sébastien Lapaque

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Brésil, début 1942. L’écrivain autrichien Stefan Zweig, qui a fui l’Europe et le nazisme, rend visite à Georges Bernanos, romancier français iconoclaste, dans sa ferme de la Croix-des-Ames, à Barbacena. Le 23 février de la même année, Zweig se suicide avec son épouse, Lotte, à Petrópolis. Pour Sébastien Lapaque, c’est la matière d’une enquête au long cours, intime et politique, miraculeusement lumineuse. Au cœur d’une géographie aussi ensoleillée que le contexte est ténébreux, à l’heure du saccage du Vieux Continent et de l’avènement d’un fascisme néotropical, le récit s’échafaude autour de la conversation que l’auteur imagine entre ces deux géants du XXe siècle, le juif sans dieu et le catholique affranchi – le peintre délicat des tourments de l’âme et le visionnaire rebelle, ardent pratiquant de la vie intérieure. Avec tendresse et précision, sillonnant les textes et les lieux, retrouvant les derniers témoins de cette époque, Sébastien Lapaque organise la rencontre de deux lucidités désarmées – celui qui croyait au Ciel, celui qui n’y croyait pas – et, face à la tentation du désespoir, poursuit le rêve tenace d’une amitié et d’un paradis possibles. L’oeuvre de Sébastien Lapaque, faite de récits, romans, essais, journaux, éloges en forme de cartes postales, est à l’image de son érudition : généreuse et passionnée.

“Jacaranda” de Gaël Faye

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Quels secrets cache l’ombre du jacaranda, l’arbre fétiche de Stella ? Il faudra à son ami Milan des années pour le découvrir. Des années pour percer les silences du Rwanda, dévasté après le génocide des Tutsi. En rendant leur parole aux disparus, les jeunes gens échapperont à la solitude. Et trouveront la paix près des rivages magnifiques du lac Kivu. Sur quatre générations, avec sa douceur unique, Gaël Faye nous raconte l’histoire terrible d’un pays qui s’essaie malgré tout au dialogue et au pardon. Comme un arbre se dresse entre ténèbres et lumière, Jacaranda célèbre l’humanité, paradoxale, aimante, vivante.

  • Grasset, 281 pages, 20,90 €

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“Bad-jens : mot à mot, mauvais genre. En persan de tous les jours : espiègle ou effrontée”. Chiraz, automne 2022. Au coeur de la révolte “Femme, Vie, Liberté”, une Iranienne de 16 ans escalade une benne à ordures, prête à brûler son foulard en public. Face aux encouragements de la foule, et tandis que la peur se dissipe peu à peu, le paysage intime de l’adolescente rebelle défile en flash-back : sa naissance indésirée, son père castrateur, son smartphone rempli de tubes frondeurs, ses copines, ses premières amours, son corps assoiffé de liberté, et ce code vestimentaire, fait d’un bout de tissu sur la tête, dont elle rêve de s’affranchir. Et si dans son surnom, Badjens, choisi dès sa naissance par sa mère, se trouvait le secret de son émancipation ? De cette transformation radicale, racontée sous forme de monologue intérieur, Delphine Minoui livre un bouleversant roman d’apprentissage où les mots claquent pour tisser un nouveau langage, à la fois tendre et irrévérencieux, à l’image de cette nouvelle génération en pleine ébullition.

  • Seuil, 160 pages, 18 €

“Aucun respect” d’Emmanuelle Lambert

 

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Une jeune femme idéaliste comme on peut l’être à vingt ans arrive à Paris à la fin des années 1990. On la suit dans sa découverte d’un milieu intellectuel qui a tout d’une caste d’hommes. Elle y rencontre l’écrivain Alain Robbe-Grillet, imposant “Pape du Nouveau Roman”, et son épouse Catherine, maîtresse-star de cérémonies sadomasochistes. Ils incarnent une certaine idée de la littérature et de la liberté sexuelle. Toutes choses auxquelles l’héroïne s’affronte tant bien que mal. Raconté avec impertinence depuis aujourd’hui, son apprentissage, d’une drôlerie irrésistible, est un conte contemporain. Sa leçon est que la liberté s’exerce dans le jeu avec les autorités établies. Et sa morale, qu’il ne faut jamais sous-estimer les jeunes femmes.

  • Stock, 224 pages, 20 €

“Matignon la nuit” de Nicolas Idier

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Un roman drôle, grave et actuel, qui nous nous rappelle que la politique est un voyage au fond de soi-même. Alors qu’en désespoir de cause, des migrants escaladent des éoliennes dans le nord de la France, au premier étage du 57, rue de Varenne, un conseiller technique à bout de nerfs tente en vain d’écrire le discours qui sera prononcé le lendemain par le Premier ministre. Que peuvent les mots face à la souffrance de ces rescapés du pire ? A mesure que la nuit s’épaissit, le réel et le rêve s’enchevêtrent, jusqu’au vertige… Nicolas Idier entraîne son lecteur dans une spirale romanesque au rythme effréné. Tantôt “enfer”, tantôt “lessiveuse”, habité de fantômes illustres et de marabouts en tout genre, Matignon devient sous sa plume le grand révélateur des caractères. Une insomnie tendre et truculente, qui nous fait accéder à la dimension intime de l’expérience politique.

  • Plon, 171 pages, 19,00 €

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